mardi 25 novembre 2008

La famine mondiale ignorée des grands décideurs nord-américains

Un rapport tout récent de la Banque mondiale, daté du 02/09/08, admet qu’en 2005, trois milliards 140 millions de personnes ont vécu avec moins de 2,50 dollars par jour. Et que 44% d’entre eux ont même survécu avec moins de 1,25 dollar.

Le 12 novembre 2008

Le seul constat possible face à une situation qui frappe un si grand nombre d’individus, essentiellement dans les zones urbaines, est la désolation complète et totale. Des choses simples comme le téléphone, l’alimentation, les vacances, la télévision, les soins dentaires et de santé sont inabordables pour des milliards de gens.

Starvation.net enregistre les impacts grandissants de la famine mondiale et de la privation totale de nourriture. Chaque jour, 30 000 personnes, dont 85% sont des enfants de cinq ans et moins, meurent de malnutrition, de maladies guérissables ou de famine. Le nombre de décès que l’on aurait pu éviter en 40 ans dépasse les 300 millions.

Ce sont ces personnes que David Rothkopf, dans son livre Superclass, appelle les « malchanceux » :
« Si vous êtes nés à la mauvaise place, comme en Afrique sub-saharienne… vous manquez de chance » écrit Rothkopf. Celui-ci continue en décrivant comment les 10% des personnes au sommet de l’échelle mondiale possèdent 84% de la richesse et comment la moitié la plus pauvre possède à peine 1%. Dans les 10% au sommet, les riches propriétaires sont les 1000 milliardaires mondiaux.
Mais cette disparité financière est-elle réellement due à la « malchance », ou n’est-ce pas plutôt le fruit de politiques soutenues par l’élite politique qui protège une minorité aux dépens du plus grand nombre?

Les agriculteurs mondiaux cultivent plus que ce qu’il faut pour nourrir correctement toute la population de la planète. La production globale de grains a atteint un record de 2,3 milliards de tonnes en 2007, soit une hausse de 4% par rapport à l’année précédente. Mais malgré cela, des milliards d’êtres humains souffrent quotidiennement de famine.

Grain.org décrit les raisons fondamentales de cette famine sans fin dans un article récent: Making a Killing from Hunger (« Cette famine qui tue ») : en même temps que les fermiers cultivent suffisamment pour alimenter la planète, les spéculateurs et les gros négociants en grains comme Cargill contrôlent les prix mondiaux des aliments et leur distribution.

La demande fait grimper les prix et la famine profite aux corporations : Cargill a annoncé que les profits pour l’échange des marchandises, au premier trimestre 2008, sont supérieurs de 86% à ceux de 2007. Les prix mondiaux ont crû de 22% de juin 2007 à juin 2008 et une large part de l’augmentation provient de la spéculation de 175 milliards de dollars sur les marchandises à venir. Le résultat a été des hausses et des baisses vertigineuses de prix qui engendrent ainsi une insécurité alimentaire généralisée et persistante.

Pour une famille très pauvre, une toute petite augmentation de prix est une question de vie ou de mort. Cependant pas un seul candidat à l’élection présidentielle des États-Unis n’a déclaré la guerre à la famine. Au lieu de cela, les deux candidats parlent de sécurité nationale et de la poursuite de la guerre au terrorisme, comme si c’était cela la question prioritaire: le 11 septembre 2001, il y a eu dix fois plus de personnes mortes de faim que de victimes de l’attentat du World Trade Center.

Où est donc le projet Manhattan contre la famine mondiale? Où est l’engagement pour la sécurité nationale concernant l’aide unilatérale contre la famine? Où est l’indignation dans les média qui exhibent pourtant des photos d’enfants agonisants? Où est la révolte contre ceux qui tirent profit de la famine?

Le peuple américain voudrait se voiler la face au sujet des enfants affamés et croit qu’on ne peut faire que peu de chose pour eux, excepté l’envoi d’un don à son organisme de charité préféré, en guise de soulagement de sa culpabilité. Mais donner n’est pas assez, nous devons aussi demander une aide alimentaire comme politique nationale lors du prochain mandat présidentiel. Pour nous qui faisons partie de la nation la plus riche du monde, c’est un devoir sacré de mettre en place un mouvement politique ayant pour but l’amélioration du sort de l’humanité et la lutte contre la famine pour les milliards de personnes. La famine mondiale et les inégalités exagérées de richesse sont dues à des politiques que nous pouvons changer. Il n’y aura pas de sécurité nationale aux États-Unis si on ne résout pas les besoins alimentaires de base.


Article original en anglais, Global Starvation Ignored by American Policy Elites, publié le 5 septembre 2008.

Traduit par Daniel Paquet et Michel Pratte pour Investigaction.

Peter Phillips est professeur de sociologie à l’Université d’État Sonoma et directeur du groupe de recherche et directeur du groupe de recherche en média « Project Censored ». Son nouveau livre Censored 2009 est maintenant disponible chez Seven Stories Press.

Aucun commentaire: