samedi 27 septembre 2008

Lettre ouverte de Richard Desjardins

QUÉBEC | Une voix de taille s'ajoute au concert des artistes pour dénoncer Stephen Harper, celle de Richard Desjardins qui, de son refuge à Rouyn-Noranda, exhorte les Québécois à se lever contre Harper, ce représentant de «la Chambre de commerce du pétrole de Calgary».

Dans une lettre ouverte qu'il a fait parvenir hier au Journal de Montréal, le chanteur-compositeur-interprète s'en prend avec virulence au chef conservateur Stephen Harper, l'accusant d'être «plus Bush que Bush» et le défenseur inconditionnel de «la Chambre de commerce du pétrole de Calgary».

Le poète exhorte les Québécois à bloquer la route de Stephen Harper le 14 octobre et, plus concrètement, il invite ses concitoyens de l'Abitibi à «lui barrer le chemin» lundi alors que le chef conservateur sera de passage à Val-d'Or.

La droite sort la strap

Richard Desjardins ratisse large. La perspective d'un gouvernement conservateur majoritaire est «une lame de fond qui se prépare depuis longtemps», juge-t-il. En raison notamment de «l'arrogance» passée des libéraux et de son chef Stéphane Dion, un boy scout qui va «payer» pour sa Loi sur la clarté référendaire.

Mais le chanteur estime que Harper va aussi «ramasser les votes de droite de l'est du pays qui se terrent dans tous les partis», ceux qui «sont tannés d'entendre parler social, environnemental, culturel». «Aujourd'hui, ce qu'on veut, c'est de l'économie vaporisée d'eau bénite», dit-il.

Desjardins reprend à son compte une expression de Nicolas Sarkozy, ce «caniche du pape» qui se targue d'être de la droite décomplexée.

«La droite décomplexée, ça sort la strap, dit Desjardins. Ça met en prison pour la vie des kids de 14 ans, [...] ça laisse un ressortissant juvénile canadien se faire juger en cour martiale américaine à Guantanamo», faisant référence au cas d'Omar Khadr.

Varger sur les artistes, c'est winner

La virulence de cette droite sans complexe se manifeste aussi contre les «Artisses». «Varger sur ce petit groupe bruyant qui ne votera jamais pour lui, c'est winner, dit-il. Ça permet d'aller chercher ces précieux votes qui lui manquent pour obtenir la majorité.»

Si on veut parler d'économie, conclut Richard Desjardins, parlons de «cette grande dépossession généralisée (qui) devrait constituer le coeur du débat électoral canadien», citant plusieurs entreprises canadiennes passées «sous contrôle étranger [...] sauf Hydro-Québec, thank you René».

Desjardins somme les Québécois à bloquer la route aux conservateurs de Stephen Harper «et construisons la nôtre, malgré le PQ, complètement perdu dans son suicide».


La lettre


À moins de cataclysme, les conservateurs vont sortir majoritaires aux élections. C'est l'arrivée sur la plage d'une lame de fond qui se prépare depuis longtemps. De longues années, les libéraux ont pu gouverner sans l'Ouest, jusqu'à en devenir arrogants pour tous. Le scandale des commandites en est l'illustration précise. On dirait que la population juge qu'ils n'ont pas été assez punis. Et ce n'est pas l'arrivée d'un scout vertueux à leur tête qui va changer quelque chose. Sa loi sur la clarté, il va la payer. Aujourd'hui, il n'y a pas encore une seule pancarte libérale à Rouyn-Noranda.

On aime ça, nous, des «chefs», des «quelqu'un-qui-sait-où-c'qui-s'enva». Alors là, on va être servis. Harper va évidemment faire le plein des voix chez lui, dans l'Ouest, et ramasser les votes de droite de l'Est du pays qui se terrent dans tous les partis. Ceux qui sont tannés d'entendre parler «social, environnemental, culturel» et qui se sentaient un peu coincés dans cette gang de sciences humaines pas d'maths, eh bien, ils vont se défouler. (En fait, tout a commencé avec la publication du fameux code de vie d'Hérouxville qui interdit la lapidation des femmes adultères mais ne semble pas proscrire l'inceste. Ni les coupes à blanc, ni les mégaporcheries.)

Aujourd'hui, ce qu'on veut, c'est de l'économique vaporisée d'eau bénite! Vous les avez vus émerger dans la campagne électorale, ce monseigneur, ce cardinal, aux prises avec d'innombrables dossiers de pédophilie dans le placard et qui prétendent vouloir régenter les règles sexuelles du bon peuple? Encore la semaine passée, sur le portail Internet de l'Archevêché de Montréal, il était écrit à la rubrique de la pensée du jour: «Le silence est le plus beau bijou de la femme, mais elle ne le porte pas souvent.»

Le phénomène est d'ailleurs répandu dans à peu près tout l'Occident. Les Italiens ont élu Berlusconi, une crapule financière notoire, propriétaire de chaînes de télé majeures. Le nouveau président français Sarkozy est devenu le caniche du pape et festoie ouvertement avec les richissimes de son pays. Il appelle son mouvement la «droite décomplexée».

Et la droite décomplexée, ça sort la strap. Ça met en prison pour la vie des kids de quatorze ans qui ont perdu la tête à un moment donné. Ça laisse un ressortissant juvénile canadien se faire juger en cour martiale américaine à Guantanamo. On a senti la virulence de cette droite dans l'affaire des «Artisses». Alors qu'il sait très bien que 80% des artistes ne gagnent pas 20 000 $ par année, Harper continue de justifier sa coupure de 45 millions en affirmant qu'il n'a pas à payer des robes de gala. Or, ce sont des écoles de formation - multiplicatrices de jobs - qui passent à la trappe. Mais varger sur ce petit groupe bruyant et qui ne votera jamais pour lui, c'est winner, ça permet d'aller chercher ces précieux votes qui lui manquent pour obtenir la majorité et aussi, ça fait oublier qu'au même moment où sa ministre faisait la job de bras dans les subventions, il achetait des hélicoptères militaires (292 M$) pour continuer sa guerre dont la majorité de la population ne veut pas.

Au fait, on n'en parle plus beaucoup de la guerre en Afghanistan. J'aurais une question comme ça en passant: Si la mission est d'aller rétablir la démocratie là-bas, pourquoi on n'attaque pas le Soudan, le Zimbabwe, l'Arabie saoudite, la Birmanie, la Chine et la Russie?

Soyons sérieux. Parlons d'économie maintenant puisqu'on arrive en fin de campagne. Parce qu'au fond, comme j'ai entendu dire cette semaine, ce n'est pas l'environnement qu'on veut réellement sauver, mais les jobs.

Comme si ces réalités n'étaient pas reliées. Pour simple exemple, l'extraction massive du pétrole bitumineux d'Alberta acidifie tout le territoire canadien à l'est. De cela, pas un mot. Des jobs, des jobs, tousuite pis là. J'ai fait une tournée cet été au Lac-Saint-Jean et sur la Côte-Nord: alumineries, papetières, grosses scieries, mines de fer, puis chez moi, fonderie de cuivre. La presque totalité de ces entreprises sont désormais sous contrôle étranger. À Fermont, ce sont des Indiens qui engrangent un million par jour de profit. Pas des Indiens de Betsiamites, des Indiens des Indes. À Rouyn-Noranda, ce sont des intérêts suisses allemands qui ronnent la bizness. Tout ce qui reste de ressources naturelles est américain. Sauf l'Hydro. Fiou! Thank you René.

Et quand profit il y a, la porte de l'évasion fiscale reste grande ouverte: des montants astronomiques, dont une seule miette récupérée suffirait à maintenir de très bons budgets culturels! Cette grande dépossession généralisée devrait pourtant constituer le coeur du débat électoral canadien. On dirait que tous les chefs de parti ont l'air sonnés devant le phénomène. Et moi aussi.

Plus Bush que Bush, Harper, majoritaire, va légiférer sans cesse en fonction de ses intérêts immédiats: ceux de la Chambre de commerce du pétrole de Calgary. Bloquons lui la route et construisons la nôtre. Malgré le PQ, complètement perdu dans son suicide.

Il se présente à Val-d'Or, ce Harper, lundi soir à 17 heures, au Forestel. J'invite toute la population de la région à lui barrer le chemin. Pour la première fois.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Les artistes sont coupés car il manque de main d'oeuvre aux Wal Mart de ce monde.

Scramme la guitar pis enwoye au travail